J'ai été étonné que Guénon ait négligé de s'étendre sur le cas de Shambhala. Pour questionner l'index existant, il faut tester toutes les orthographes possibles mais je n'ai pas trouvé grand chose, autant dire rien du tout. En revanche j'ai trouvé une explication plausible...
Les recherches sur Shamballa dans l'index de l'œuvre de René Guénon
(...) le neuvième Avatâra est représenté sous la figure de Jagannâtha, et le dixième sous celle d’un cheval sans cavalier et portant un parasol, conduit par un personnage qui peut être Indra, ce qui rappellerait les anciennes figurations bouddhiques du « grand départ » ; mais ne pourrait-on penser aussi que ce personnage couronné est celui qui, suivant certaines traditions, doit amener Kalki de la mystérieuse cité de Shambala ?
Lui qui a toujours été excité par les "mystères" vrais ou faux, en est resté là.
Dans une lettre a Reghini de 1924, on trouve ceci :
Je ne crois pas que Mme Blavatsky ait jamais parlé de l’Agarttha ; mais elle parle quelque part d’une ville appelée Shamballa, qui était située du côté du désert de Gobi, et qui aurait disparu sous terre ; vous verrez, d’autre part, ce que je dis au sujet de sa “Grande Loge Blanche”.
Dans une correspondance avec Mme Lapasse :
Au Thibet, on parle de Shamballa comme d’un ancien centre spirituel qui était situé vers le Nord, et qui est disparu depuis longtemps, mais qui peut être « retrouvé » par ceux qui atteignent un certain état spirituel. Quant au dernier Avatâra, ce qu’il y a de singulier, c’est qu’en réalité, il n’est dit nulle part qu’il doive « naître » au sens propre de ce mot… Enfin, l’histoire du nom d’armagaddon est complètement absurde ; ce n’a jamais été un nom de lieu, d’ailleurs syrien (la forme exacte est Al-Megiddo, mais il a été « grécisé ») et tout à fait inconnu dans l’Inde et au Thibet avec les langues desquels il n’a rien à voir.
Dans une lettre à Lovinescu :
L’interprétation suivant laquelle le 10e Avatâra naît de la race tartare serait, au fond, d’accord avec la Tradition d’après laquelle il doit venir de “Chang Shamballa”, si on admet la localisation au Nord du Thibet (outre le sens symbolique qui, bien entendu, n’est pas exclu par là). – Pour Armilus, je ne crois pas que sa manifestation puisse n’être pas soumise au temps dans le sens que vous dites ; s’il est un être humain, ce qu’il “incarne” ou représente en même temps ne change rien à cet égard.
Je croyais avoir trouvé une autre allusion en relation avec les écrits de N. Roerich mais rien à propos de ce personnage si on l'orthographie ainsi. Il faut accentuer le e pour trouver 2 lettres qui citent Roerich dans le texte qui sort mais sans accent. Mystères de l'informatique !
Pourquoi Guénon a occulté Shamballa ?
Une explication nous est proposée dans une lettre de Léon Laken au directeur des Editions Arché. Je cite :
Quant au nom de Shamballa, qui est un autre nom pour le Centre suprême, René Guénon le connaissait très bien, puisqu’il le mentionne dans une lettre à Arturo Reghini, datée du 16 novembre 1924 (in, Les Nombres Sacrés, Archè, Milano, 1981 p. 206). La raison pour laquelle il ne reprend pas ce nom alors qu’il adopte Agarttha est très certainement le fait que René Guénon ne voulait absolument pas qu’on fasse un amalgame avec la « Grande Loge Blanche » désignée comme étant Shamballa, qui est en réalité un produit propre à la Société Théosophique, qualifiée par René Guénon comme étant « une caricature ou une parodie imaginaire de l’Agarttha (/Shamballa).» (Le Roi du Monde, Gallimard, 1979, p. 71)
Une inversion complète !
De cela je m'en étais douté et je l'ai déjà écrit. Shamballa en tant que royaume à ciel ouvert est une donnée traditionnelle du bouddhisme tibétain. Guénon qui a fait grand cas du lamaïsme sans rien en connaître et en racontant des conneries au sujet du Potala et d'une "pierre noire" introuvable aurait du se borner à dire que la "grande loge blanche" des théosophistes est une parodie de Shamballa dont le roi pouvait être assimilé à son cher "Roi du Monde". Il est vrai que çà ne colle que du point de vue du symbolisme spécial. Le "Roi du Monde" assimilé au "Manou" d'une ère devrait durer au moins le temps d'un manvantara or les rois de Shamaballa meurent et sont remplacés périodiquement.
Quant à Agarttha, cette foutaise empruntée à Saint-Yves d'Alveydre et à Ossendowski qui s'en est manifestement inspiré, ce n'est pas un royaume à ciel ouvert mais un monde souterrain plus apte à figurer un monde infernal.
Une vingtaine d'occurrences sur "Agarttha"
Ce qui nous intéresse c'est son caractère souterrain, il a été emprunté à Ossendowski et est relaté dans le chapitre VIII du Roi du monde.
L’Agarttha, dit-on en effet, ne fut pas toujours souterraine, et elle ne le demeurera pas toujours ; il viendra un temps où, suivant les paroles rapportées par M. Ossendowski, « les peuples d’Agharti sortiront de leurs cavernes et apparaîtront sur la surface de la terre ». Avant sa disparition du monde visible, ce centre portait un autre nom, car celui d’Agarttha, qui signifie « insaisissable » ou « inaccessible » (et aussi « inviolable », car c’est le « séjour de la Paix », Salem), ne lui aurait pas convenu alors ; M. Ossendowski précise qu’il est devenu souterrain « il y a plus de six mille ans », et il se trouve que cette date correspond, avec une approximation très suffisante, au début du Kali-Yuga ou « âge noir », l’« âge de fer » des anciens Occidentaux, la dernière des quatre périodes en lesquelles se divise le Manvantara; sa réapparition doit coïncider avec la fin de la même période.
L'occultation d'un centre spirituel ne peut se concevoir que sous la forme d'un retour à sa source dont d'un éloignement par le haut c'est pourquoi le symbolisme de Shamballa, à savoir d'un royaume situé au Nord (vers le pôle) et protégé par des hautes montagnes est nettement plus adéquat.
Bref on ne m'ôtera pas de le tête l'idée que René Guénon est resté un "occultiste", Agarttha pour Shamballa en constitue une signature indiscutable. Qui dit "occultisme" dit obscurité et donc des choses qui se font par dessous. Quand j'ai découvert cela, je me suis dit que pour avoir fait pareille "boulette", il fallait se méfier de Guénon. C'est ainsi qu'avec le temps l'Agarttha est devenue une terre creuse.
A propos du caractère souterrain de son Agarttha Guénon s'est contenté de nier la possibilité d'y voir un caractère infernal. Nous ne le pensons pas, pas plus que nous ne pensons qu’on puisse de bonne foi identifier l’Agarttha à la « Grande Loge Blanche », c’est-à-dire à la caricature qu’en ont imaginée les Théosophistes, ou interpréter dans un sens « infernal » sa situation « souterraine », c’est-à-dire cachée aux hommes ordinaires pendant la durée du Kali-Yuga. Page 168 du tome I des Etudes sur la Franc-Maçonnerie.
Enfin c'est bien Saint Yves qui parlait des peuples de l'Argartha sortant de dessous terre dans des termes qui, immédiatement, font penser aux hordes de Gog et Magog.
Enfin que n'a pas écrit comme sottise Guénon à propos de son fichu Agarttha, toujours dans le Roi du monde : nous avons déjà noté en particulier la similitude de Lhassa, centre du Lamaïsme, avec l’Agarttha !
C'est après que j'ai découvert que l'Islam ne peut être qu'une forgerie assez grossière quoique très sophistiquée par certains aspects.
Une anecdote pour terminer
J'ai lu récemment quelque part la réponse d'un hiérarque tibétain, il me semble qu'il s'est agi du Panchen-Lama répondant à Alexandra David Neel. Il aurait rit en lui demandant si elle prenait les tibétains pour des taupes. Guénon aussi prenait Lhassa (et le Potala) pour une taupinière !
Un ami a bien résumé la question : l'Agharta façon Guénon inspiré (Louis de Maistre l'a indubitablement démontré) par les falabraqueries de Ossendowski est très disons "ambigu", ça se résume à un centre souterrain régissant les destinées d'un monde de marionnettes.
J'avais lu je ne sais plus où que Guénon aurait, à l'origine, songé à publier son livre sans titres de chapitres,"comme un conte initiatique". Cela aurait certes, si c'est vrai, évité bien des délires.
Le plus fou c'est que c'est Ossendowski qui est l'inventeur du terme "le roi du monde" et pas Guénon.